L'Astre Tyran

[Helera Kor'rial]

Il est des matinées comme celles-ci, bercée par le bruit des moteurs interstellaires et des vrombissements de quelques machineries spatiales. Les vibrations du vaisseau qui se répercutent dans les parois, dans le sol, dans la peau même de bijoux de technologie. Comme si la vie elle-même avait été contrefaite, cette entité vivait d’une volonté brisée, mais propre. La seule différence résidait dans son inexistence dans les flux de la Force, là où elle n’apparaissait pas. L’inquisitrice était la seule à capter ces fluctuations et contemplait dans son entièreté la flotte et ses petits signaux qui s’agitaient. Ce n’était pas le casque qui lui barrait le visage qui aurait pu brouiller sa vision. Sa lucidité retrouvée lui conférait une clarté sur les gens et sur les évènements dont elle ne se serait pas crut capable des semaines auparavant. Désormais, son plan continuait à progresser comme elle l’avait prévu. Mais elle ne comptait pas s’arrêter ou se reposer, car seuls comptaient ses actes. Et ils n’étaient pas encore achevée.

Elle sortit de sa torpeur quand elle sentit la planète s’approcher, et avec elle, l’éblouissement de la vie. D’un pas décidé, l’inquisitrice déambula dans les coursives anthracites du vaisseau, passant devant plusieurs groupuscules de soldats, d’officiers et autres uniformes de la marine. Non sans alerter les attentions et lever des questions. L’inquisitrice avait fait son apparition il y a quelques semaines dans l’empire et depuis, elle déambulait au travers des mondes intérieurs, poursuivant un objectif pour le commun inconnu. Ce secret levait de multiples questionnements et assurait d’entourer une aura de mystère autour de sa personne. La dernière porte menant au pont lui fut ouverte et elle y pénétra dans un silence religieux. Seul le piaillement de quelques droïdes et autres machines ne trahirent la présence des femmes et hommes concentrés à leur tâche. Un officier de liaison l’interrompit dans sa démarche, non sans cacher sa crainte de l’avoir contrarié. Par bien des aspects, ce n’était pas seulement l’inquisitrice qui se tenait là, mais le Seigneur Vador lui-même.

I« nquisitrice, le spatioport a confirmé notre présence. Nous entamons la procédure d’amarrage. De plus … le grand Moff Sodervall est prêt à vous recevoir, comme vous l’avez demandé. »

Elle opina du chef et se retourna vers la planète. Columex attendait patiemment, animée par les quelques transporteurs et autres convois impériaux. Ils étaient de lointains traits, des lumières dénaturées dans le vide spatial, se confondant avec les étoiles.

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Les bottes claquèrent dans le grand Hall du palais impérial de Columex, tandis qu’ils avaient entamés leur progression. Le bâtiment était dénaturement grand et surtout puissamment massif, gargantuesque en sa base, grimpant tel une pyramide antédiluvienne jusqu’à quelques tours disséminés aux quatre coins. A bien des égards, il ressemblait au temple des Jedi de Coruscant, dont le simple parallèle lui vola un sourire. En effet, Carth Sodervall était homme dont la notoriété publique pouvait être axé à sa propension à lutter contre les Jedi. Cette aversion s’était manifestée par nombreuses de ses prises de parti dans les questions théologiques précédentes, bien avant son arrivée au poste. Elle n’avait jamais pu placer de curseur sur ses intentions à son égard. Et ce n’est pas par hasard que l’uniforme qu’elle avait choisi était celui qui rappelait l’inquisition à son époque la plus prolifique.

Ainsi elle fut menée au travers de ce dédale aux pierres blanches et à la lumières tamisées devant ce qui se présenta comme une lourde porte. Cette dernière était ouvragée des armoiries de l’empire, agrémenté de quelques enluminures coniques tout autour du cadre et de la poignée. On l’annonça, on la laissa entrer et la laissa seule. A l’intérieur, un homme d’une grande stature, marquée sur le visage par quelques guerres passées. Ses sourcils étaient tendus sur son front, arquant sans cesse vers le centre de son visage et lui donnant un air méchant constamment. Ses cheveux grisonnant se faisaient éparses et coiffés à la manière d’un militaire, ce dont il n’était assurément pas. Non, l’homme avait bel et bien connu la guerre, mais pas à la place des soldats. Au mieux avaient-il été dans l’administration pour gérer les troupes. En revanche, on ne pouvait pas lui enlever sa fervente efficacité quand il avait fallu garder les frontières de l’empire. Notamment à cause de la menace Mon Calamarienne aux frontières du secteur. Au final, il était sans doute un des piliers de la survie et la charge qu’il devait gérer était bien plus grande qu’un Grand Moff de l’espace impérial profond. Il était assis derrière un énorme bureau, dos à un énorme panorama de la capitale, d’où des lignes de vaisseaux passaient et repassaient, surveillées par deux énormes batteries turbolasers.

A côté de lui trônait un jeune homme, peut-être entamant le début de sa deuxième décennie. La stature droite, le visage indemne et une curieuse aura qui dans son regard. Il semblait la transpercer de ses yeux bruns. Cela lui donnant une impression étrange, une impression de déjà-vu si caractéristique et pourtant si ancienne qu’elle n’en était pas certaine.

« Conseillère Kor’rial », ponctua le grand Moff, la tirant de ses rêveries.

L’inquisitrice ôta son casque pour le placer sous son bras droit, serrant vigoureusement la main tendue par son interlocuteur. Sans sourire, elle affirma son respect du protocole.

« Grand Moff Sodervall. Merci de me recevoir. »

« C’est avec surprise que j’ai appris votre demande de rendez-vous. Je n’ai pas eu vent de quelques affaires ésotériques dans mon secteur. Ou peut-être est-ce de nouveau dessein de l’empereur que vous m’amenez ? »

Helera resta muette et son regard azur s’était déjà perdu sur le jeune homme au visage neutre. Elle ne bougea pas, sans sourciller aucunement. La Force s’activait maladroitement et les flux étaient bouleversées. Mais pire encore, elle sentait comme un fil du destin se matérialiser dans cette salle. Un de ceux dont elle avait la possibilité de percevoir et d’en récupérer les opportunités. Le grand Moff ne s’en offusqua pas pour le moment et continua :

« Je vous présente mon fils unique, Kahl Sodervall. Je l’initie aux rudiments de la politique, sa présence ne nuira pas à nos échanges. »

L’intéressé s’inclina respectueusement, une main sur le torse, la tête pliée. Manœuvre qu’elle imita à son tour, avant de ponctuer :

« Cela pourrait-être même tout l’inverse. »

[Helera Kor'rial]

Le Grand Moff servit dans son placard une bouteille de Whisky corellien, bien souvent décrié mais bu par à peu près toutes les grandes pontes de cette galaxie. Helera observa la cicatrice qui lui bardait tout un côté du visage, entourant son œil et descendant jusque dans son cou, projetant une strie par moment vers l’intérieur du visage. Cette marque semblait celle d’une électrocution ou d’un feu très rapide. Quand il le lui en proposa, elle refusa poliment d’un geste de la main. Le fils quant à lui n’eut droit à aucune proposition. La reine l’observa de nouveau et croisa son regard, qu’il ne put tenir plus d’un demi second.

« Bien, Conseillère, que me vaut l’honneur ? »

Sa mine s’était renfrognée et s’était aspiré dans son fauteuil. Sa jambe droite passa par-dessus la gauche et son verre d’alcool jaunâtre au niveau de son visage, se ballotait dans une main aux longs doigts. La reine joint ses mains l’une avec l’autre et bomba légèrement le torse.

« Grand Moff Sodervall, vous n’êtes pas sans savoir que certains partis du Conseil sont en train de reforger l’inquisitorius. Avez-vous connu la première organisation ? »

Sodervall étira un sourire et but une lampée de son whisky.

« J’ai croisé quelques inquisiteurs à l’époque. Des gens portant une armure similaire à la vôtre. Je crois comprendre pourquoi vous n’avez pas opté pour votre uniforme réglementaire. Ils avaient de bon qu’ils permettaient de réguler la vermine Jedi. »

Dans le regard azur passa les marques d’une malice planifiée.

« Précisément. Et que pensez-vous de cette idée ? Du conseil théologique peut-être ? J’aimerai savoir si vous me le permettez la manière dont vous me percevez. »

La question sembla porter atteinte à sa personne. Non pas directement, mais plutôt parce qu’il n’avait pas prévu ce genre de familiarité. L’empire avait été et est très froid, distant et très robotique. Il obéissait à des codes qui permettaient à chacun de se retrouver. Briser ces codes, c’était se risquer à l’inconfort, à l’insécurité. Un silence traîna qui fut des plus anxiogène. Le fils fronça les sourcils et jeta un regard à son père. Le père resta un instant interdit et semblait emprunt à une grande concentration. Helera le sentait, il s’était pris au jeu.

« Puisque nous jouons un jeu franc, je vais vous dévoiler le fond de ma pensée. Quand j’ai su que l’empereur allait engager une conseillère théologique, j’ai été choqué et presque consterné. J’ai suivi votre parcours avec intérêt au sein de nos administrations. J’ai compris en lisant les lois publiées par le conseil l’intérêt qu’il vous avait porté et j’avoue avoir été agréablement surpris de voir que la régulation jedi avait lieu dans l’empire. Mais j’en viens aujourd’hui à me demander comment faire confiance à une personne qui n’hésite pas à trahir les siens ? »

Helera resta interdite. Sa franchise l’avait piqué à son tour, peut-être un peu trop. Le jeu avait été joué jusqu’au bout et il avait avancé sa cavalerie dans une attaque frontale. Mais il n’avait été que trop téméraire et l’inquisitrice avait encore plus d’un piège dans son sac. Cette question à laquelle elle fit mine d’être concernée, était en réalité une des nombreuses redondances que les impériaux lui avait posé. Elle y était préparée.

« Si j’avais été cette traîtresse que les médias ont dépeint, pensez-vous que l’empereur prenne le risque de me nommer à ce poste ? Vous savez que non et c’est pour cela que je suis dans son gouvernement et pas dans celui du Triumvirat. »

« Je vous l’accorde. »

« Quant aux miens, si vous faites références aux Jedi, il y a une très nette barrière entre leur idéologique rétrograde et dogmatique, et ce que je suis. Notre seule convergence se trouve dans notre accès à des pouvoirs extra sensoriels. Mais je ne suis pas des leurs. Je ne suis pas un Jedi, mais bien une sensitive de l’empire, une inquisitrice traqueuse de Jedi. »

Il arqua un sourcil et de nouveau plongea leur échange dans un long silence. Il porta son verre à sa bouche et y vida le contenu. Il se rapprocha soudainement du bureau et y posa les coudes, approchant son buste de son interlocutrice et fronça ses sourcils, lui donnant un air de méchant d’holofilm.

« Que voulez-vous de moi, conseillère ? »

Elle imita son comparse et s’approcha du bureau, calculant son mouvement pour le faire durer et poser sa prochaine phrase.

« L’inquisition a besoin du soutien absolu des Grand Moff pour traquer les Jedi de notre empire. Mais plus encore, j’aimerai que vous preniez part à ce projet. »

« Dans quelle mesure ? Financière ? »

« Non. Une carte blanche pour traquer dans votre secteur. Une mise à disposition des relevés de midi chloriens de vos administrés et le cas échéant, des sensitifs reconnus. Et une alliance implicite nous liant à vous. Autrement dit, l’ouverture d’un centre dans votre secteur pour permettre un déploiement rapide des inquisiteurs. Je m’engage même à fournir à vous fournir un inquisiteur à votre garde rapprochée. »

Sodervall recula de nouveau dans sa chaise et se leva. Il se dirigea vers la grande verrière dans son dos et y perdu son regard. L’inquisitrice ne le lâcha pas et le rejoint, croisant les mains dans son dos. Les vaisseaux allaient et venaient.

« Que me cache cette offre inquisitrice ? »

« Rien, Grand Moff. Rien que la promesse de notre solide collaboration. Je n’ai besoin de rien d’autre que votre confiance. A ce titre, je vous propose la chose suivante. Laissez votre fils m’accompagner, il vous fera état des rapports d’activité. »

Elle sentit peser dans son dos un regard insatisfait, mêlé à une curiosité renouvelée. Le Grand Moff se retourna vers son fils, puis vers l’inquisitrice. Cette dernière ne le regardait pas, scrutant l’espace aérien de la planète.

« Accordé. »