« Tiens. » Passaient-ils juste devant quelques consoles qu'ils croisèrent un être, jeune et singulier, un uniforme d'agent et des menottes aux poignets, tiré, dans son incrédulité, par deux StormTroopers au liserai gris.
« Mais... quoi, les gars... Vous voulez bien me dire ce que j'ai fait au moins ? C'est une erreur, c'est sûrement juste une erreur... » Herklir ne broncha pas. Il fit claquer sa langue dans un bruit de succion molle, avant de désapprouver d'un sifflement grave et continu.
« Jeune homme plein de bonne volonté. Trop naïf. Venir dans une cellule avec arme et clef. Tss tss tss. » Le pauvre allait payer son envie de répondre en confiance à la dernière volonté d'une détenue.
Mais la balade ne fut que trop courte. Dans cet endroit froid et noir, où les identités se détachaient d'une plaque colorée épinglée sur le torse, le temps s'étirait, mais les discussions ne duraient pourtant jamais longtemps.
« Nous disions donc... - J’ai besoin d’une identité qui me permettra de franchir les frontières. Toutes les frontières. Je dois pouvoir aller partout. » Herklir hocha la tête, fermant doucement les yeux.
« Une Mirialan vient rarement d'ailleurs que Mirial. Même si certains natifs, ou certaines natives, pensent pouvoir affirmer le contraire. » L'Empereur était au courant qu'il était sur écoute. Pour aider à décrypter après coup ce que son oeil averti ne percevait pas sur l'instant.
« Mais des fois, ils naissent ailleurs... ou parfois même ils émigrent et prennent une nouvelle nationalité. » Il tapota sur la table de son index.
« Vous aurez votre identité d'ici quelques heures. Avec une histoire à apprendre par coeur. » Elle allait bénéficier de la création d'une identité, comme celle qu'on préparait pour les Renseignements Impériaux. Le Bureau était maître dans l'art des faux sans faille également, mais ils s'occupaient surtout des identités à l'intérieur des frontières.
« Vous resterez dans nos locaux quelques temps. Je vous mènerai aux bons endroits ensuite. » Mais les exigences de la Dame n'allaient pas s'arrêter là. Comme si elle n'avait pas connu de pause entre ses deux phrases, elle enchaîna directement, pointant du doigt son envie d'en finir, avec ses conditions, et de partir de là.
« D’un vaisseau simple, rapide et discret, pouvant accueillir une équipe restreinte, et muni d’un hangar pour un chasseur deux places, dont j’ai également besoin, d’apparence sans affiliation. » Herklir ne cilla pas, mais fini par hocher la tête.
« Accordé. »ELle sembla défaillir un instant. La main sur la temple, l'autre sur la table... avec une sorte d'envie de vomir visible sur les pupilles dorées de la Mirialan. Tiens ? Pas question de demander si cela allait. Ca n'allait pas. Ni de proposer quoi que ce soit. Les Sith étaient de la race des prédateurs. Leur proposer de l'aide, c'était les vexer, et surtout, c'était perdre son temps.
« Et ... j'ai besoin de mon arme. - Avant que vous ne rembarquiez. » Surtout pas avant. La suite allait se corser.
« Et d'une de ces boîtes, avec le lézard. » Herklir pencha la tête en avant.
« Pourquoi demander cela si vous connaissez la réponse. » Hors de question. On allait déjà l'arroser d'une identité de grande envergure, ainsi que d'un vaisseau qui collerait à son image. Donner accès à une créature qui était utile contre ces assassins de Korriban...
« Vous pourrez aller en salle de repos. Je viendrai vous chercher quand tout sera prêt. » Il fit signe aux gens à l'entrée de l'accompagner en salle de repos, en réalité une autre cellule, plus grande, avec de quoi se relaxer, mais avec un avantage : si des caisses noires avaient été disposées derrière les murs, la Force pouvait opérer au centre de la pièce. On pouvait sentir la terre sous les dalle de sol, et un plafond épais par-delà la tête, dans le cas où Mya voulait tenter une évasion. Sinon, c'était couchette une place avec matelas en latex, deux oreillers, une vapodouche et un coin de toilette. Pas de paroi, mais pas de caméra. Juste des micros très sensibles.
Cela allait durer cinq heures.
Herklir fit aussitôt entrer un subalterne.
« Vous avez vu ses vêtements. Sa condition physique. Vous avez quelque chose ? » Le subalterne avait l'air fatigué. Presque absent. Il cligna des yeux et se lança sur une voix monocorde.
« Les vêtements qu'on lui a fourni en font quelqu'un de riche. Les riches aiment parfois avoir des loisirs. L'escrime en fait partie. » Herklir approuva.
« On peut la mettre nouvelle riche d'une planète du Secteur Corporatif. Une enquête approfondie là-bas sera difficile. La vie privée des entrepreneurs s'apparente au secret des affaires. » Pas faux.
« On a quelques logements de luxe en attente là-bas par le biais des Renseignements. On peut leur demander un transfert. » Herklir secoua la tête.
« Ils ne voudront jamais nous aider. Envisagez plutôt un transfert de compétences et la redonner comme agente, à ce stade... » Le subalterne haussa les épaules.
« On ne peut pas juste faire ça comme ça. Il va falloir leur demander un accès. » Herklir réfléchit une seconde.
« Je vais m'en occuper... Pour le vaisseau ? » Autre haussement d'épaules.
« On a capturé un Yacht à une étoile montante de la drogue. Le modèle conviendrait parfaitement. Il suffira de l'immatriculer dans le Secteur Corporatif et le tour sera joué. » Herklir ne cilla pas. Il finit par hocher la tête après une grosse minute de réflexion intense, qui donnait toujours à voir palpiter les veines de sa tempe fondue.
« Bien. Fabriquez cette identité de nouvelle riche télosienne. »Ce fut lancé. Herklir passa quelques communications. Il allait avoir besoin d'emprunter un atelier qui servait de façade, et un appartement luxueux sur Télos.
Cinq heures après, on vint cogner à sa porte. On lui demandait de se rhabiller si ce n'était déjà fait. Herklir se permit ensuite d'entrer.
« Venez avec moi. » Il partit en avant, laissant la Sith lui emboîter le pas, toujours bien flanquée de soldats avec une cage dorsale. Il finit par la faire atterrir dans une pièce sans fenêtre, éclairée aux néons, avec des postes de travail partout... Des armoires, des serveurs, des ordinateurs, des comlinks branchés par fils par centaines sur un terminal... des fils, des postes de soudure, des caisses de composants, bref... et au milieu, un homme dans la trentaine, barbe collier et cheveux roux, coupe en brosse et une tenue civile qui se composait d'une chemise et d'un polo à col en V.
« Je le laisse vous expliquer. » Les soldats se disposaient bien. L'homme ne semblait pas être impressionné de la situation. Juste un peu endormi. Il glissa sur les roues de son fauteuil pour atterrir sur un plan de travail précis, puis refit rouler sa chaise pour aller devant la Sith. Il tendit une petite sacoche en cuir avec un fermoir élégant, en bon état, mais auquel on avait mit un peu de patinage et auquel on avait éraflée quelques endroits.
« Vous êtes Ludmila Andura. Vos parents sont des émigrés de classe moyenne de Mirial venus faire fortune dans le Secteur Corporatif. Après vous avoir payé des études en ingénierie, vous avez monté un atelier de fabrication d'automates pour chaînes de montage. Vous avez votre atelier et un penthouse sur Télos. On vous a dégotté un Yacht Sorosuub de dernière génération. Immatriculé au nom de Souffle Solaire. Vous changerez de nom si ça vous chante. » Il céda la sacoche.
« Vous y trouverez un récapitulatif. Ainsi que votre histoire. Apprenez-là par coeur. On va mettre en place un système de couverture, des fois que quelqu'un fasse une enquête sur vous. une contradiction, et votre identité vole en éclats. »Herklir se disait qu'elle s'en fichait. Qu'elle n'allait pas s'embarrasser de devoirs d'un espion commun, par orgueil. Résultat, au premier soupçon d'un tiers, elle allait se mettre dedans, et probablement l'Empire avec. Elle serait traquée comme une chienne, abattue comme une chienne, jetée à la fosse à merdes comme une chienne.
« Allons voir votre vaisseau, voulez-vous ? On va le laisser travailler. »
Le vaisseau était briqué, à la fourrière. Les soldats l'accompagneraient jusqu'à la rampe, selon les indications d'Herklir. Ce dernier donna une autre petite sacoche avant qu'elle ne parte.
« Voici un compte bancaire situé sur Télos, sur lequel nous allons créditer 5 millions de crédits Corporatifs par mois. Vous gérerez vos frais, incluant pour le vaisseau et votre logement seule. Vous gérerez aussi les valeurs aux bureaux de change sur les marchés impériaux et républicains. » Se trouvaient dans la sacoche aussi de quoi accéder au compte bancaire, les identifiants biométriques calibrés sur elle, au nom de sa fausse identité, et une puce de débit chargée de deux mille crédits, pour son voyage de retour.
« Laissez l'Empereur et l'Empire tranquille. Ce premier entendra raison et s'excusera de son geste, le second n'a rien à vous offrir. »Ensuite, il la laissa partir. Les soldats la suivirent, et au bas de la rampe, l'un d'eux lui tendit son sabre laser. Ses anciennes affaires étaient restées dans les geôles impériales. Puis chaque impérial repartit.
Non sans qu'Herklir s'assure que le traceur était bien posé sur le vaisseau, histoire de vérifier son point de chute. Juste une petite curiosité. Rien de bien méchant.