Pourquoi s'interrompre. Les saveurs nouvelles, présentées par un futur conjoint, délaissées, éventées, au profit d'un goût plus classique, plus connu. Valait-il mieux que du cacao préparé ? Peut-être bien. Il s'en voyait flatté. Qu'une tartelette à la crème aille donc se faire voir. Posée sur la table, en équilibre sur le bord... qu'elle en tombe même. Il n'en avait cure. Il avait sa Dame, là, à lui seul. C'était parfait. Mais elle le quittait déjà... Glisser à ses pieds, et... Oh... « ... » Une envie de poser des questions. "Tu ne veux plus manger de tout ça ?" On la sentait partie ailleurs. Elle n'avait jamais fait ça... et il ne l'en savait pas capable, ni soucieuse. Les doigts dans les cheveux commençèrent vite de se crisper. Sa mâchoire se serra, sa tête partit en arrière, ses jambes tentèrent de trouver une position fixe, et le palpitant reprit sa marche forcée. Il caressa les cheveux entre deux contractions, fit s'évader des souffles langoureux.
Il allait amener du chocolat plus souvent.
Elle le saurait bien assez vite, mais l'Empereur se réveillait à heures fixes. Souvent sur les heures locales. 5 heures, heure locale. Il aimait dormir sur les planètes aux révolutions lentes. Il faisait de meilleures nuits. Sur un vaisseau spatial, le temps était plus volage, plus organique, calibré sur un cycle de fatigue corporelle et mentale, plutôt que sur une lumière du dehors. Mais il savait qu'il ouvrirait les yeux après 4:59 et avant 5:01, Heure Standard. Dans l'espace, le fuseau horaire était universel, calibré sur une périodicité de 24 heures, la plus basique. Les militaires se gravaient cette trame temporelle sous les paupières, qu'ils soient formés au réveil optimal rapidement, et aux heures de grandes manoeuvres. Deux clignements d'yeux, et l'esprit impérial était déjà à ses pleines capacités. Il aurait pu sauter du lit et promulguer une loi, sans qu'elle continenne la moindre faute. La soirée avait fini tôt hier soir. Ils étaient fatigués, et le cadre avait un côté reposant. Et mieux encore, personne ne les avait dérangé. Il se rendit compte que sa main était entravée sous une masse inamovible. Il embrasse l'épaule nue du roc qui le maintenait ancré avec un sourire. Il fit glisser la couverture et l'observa en entier. De sa mémoire il n'avait jamais vu femme plus belle. Les cheveux en liberté, la poitrine divine qui se soulevait au rythme de la respiration, une main posée sur lui. Il se comptait peu de bonnes actions. En était-elle le prix ? Méritait-il un tel sort ? Il se posait tout un genre de question. Mais surtout, si Elizabeth était le prix des bonnes actions, quel serait celui de ses mauvaises ? « Mon Dieu. » Il tenta de tirer sa main. Sans grand succès. De l'autre, il parcourut le bras, le creux de l'aisselle, s'arrêta sur un sein, et repartit sur la cuisse. Il eut envie d'elle, mais il se contint. Il fallait laisser une chance à la soirée. La journée serait insoutenable. L'angoisse de l'attente... levé de si bonne heure. Il ne savait même plus quand la cérémonie avait lieu... « A 13 heures. Oui, voilà. » La cérémonie commençait avant, le temps du défilé, de la présentation, des échanges de voeux... le baiser solennel. Ensuite un banquet, avec quelques invités de marque, triés selon les affinités réelles.
L'après-midi en fête, à laquelle le vaisseau entier était convié. Les nobles se mélangeraient un temps seulement aux soldats, pour renforcer les liens fraternels qu'un tel évènement devait soulever. La soirée finirait au creux d'une Nébuleuse.
Et personne pour les y déranger.
Il tenta encore de libérer sa main, mais cette fois il y alla un peu fort. Elizabeth s'agita, et ouvrit les yeux en douceur. Il lui offrit un sourire de pâle matinée, et lui caressa la joue. Elle repartit en sommeil, mais en s'agitant, elle lui laissa de quoi partir. Il reprit sa routine. Il ferait des matinées en caresses plus tard. Pas tous les changements d'un coup... Au bas du lit, exercice basique, flexions, extensions, pompes, abdominaux. La sueur goutta sur sa descente de lit, tenant le choc sans faire monter son rythme cardiaque. Il prit juste le temps de se retourner pour voir une naïade venir à lui, de toute sa hauteur. Son coeur n'était pas encore entraîné à ça, et repartit à toute allure. Rien qu'à la voir, j'aurais fait mon exercice de la semaine. « Tu as bien dormi ? » Harlon lui sourit, les mains derrière le dos, balancé en arrière, les muscles encore chauds. « Mieux que jamais. » Acrobate, il courba son dos en arrière et sauta sur ses pieds pour se retrouver debout. Torse nu, en simple boxer, luisant de transpiration, les veines saillantes et les plaques musculaires tendues, à sourire d'un ton fier. « En paix. » Il empoigna une serviette sur le côté et s'essuya un minimum. « Et toi ? » Il se débarbouilla et lui offrit un baiser au goût salé. Il ne le fit pas durer, qu'elle ne froisse pas son nez. Un homme au lever qui sortait d'exercices, même de si faible intensité, ne sentait jamais très bon. « Comment as-tu organisé la journée ? J'ai besoin d'un peu de temps pour me préparer. - Une heure cinquante trois minutes et trente deux secondes, précisément. - ... Voilà. » Il ricana. Son droïde pouvait se trouver aussi impertinent, mais uniquement sur sa demande. Les industriels qui lui avaient conçu avaient retiré toute l'intelligence artificielle qui rendait les robots plus... humains. Histoire de ne pas s'embarrasser de déchets électroniques devant sa porte, surtout. « Je te laisse Une heure et cinquante et une minutes seulement. Cela suffirait ? » Il lui sourit. Elle lui rendit. « Je t'aime. » Il termina de s'essuyer, rapidement, balança sa serviette au sol, et ouvrit les bras. Pas de baiser. Les raréfier donnerait l'envie de réitérer plus tard, dans un meilleur cadre. Ni rien d'autre d'ailleurs. « Moi aussi. Et pour toujours, très bientôt. » L'étreinte dura un temps indéfini. A la fin, il annonça succintement le programme. « Tout devrait commencer à midi. Tu seras mise à l'honneur depuis les cabines, jusqu'au pont. Je suivrai. Tout devrait durer une heure à peine. Ensuite, les festivités. » Un peu à huis clos, mais pas complètement quand même. Ils devaient en profiter pour s'amuser un peu. « J’aurais d’ailleurs besoin d’une cabine pour me préparer. » Il acquiesça. Il prit une mine triste. « Paraît-il qu'on ne doit jamais voir la mariée en tenue avant le mariage... » Dès qu'elle commencerait à se préparer, ils devraient rester en place. Ne rien faire. « Indique-moi laquelle, je vais faire emmener mes affaires. » Il acquiesça de nouveau. « On va prendre celle qui t'étais réservée. Elle l'est toujours. » Réservée. Il enfila un pantalon, une chemise, ceux de la veille, et sortit l'accompagner dans le couloir, suivi d'I-Sys. De part et d'autre du boyau impérial, on trouvait des Gardes Rouge, et des Gardes Arkaniens. Oberan trônait là aussi, stoïque comme à son habitude. Harlon salua de la tête dans sa direction, conscient qu'il l'observait. Conscient aussi qu'il le détestait. Son regard trahissait tout, malgré les pupilles blanches. Ses paupières ne mentaient pas sur ses envies. Quand il passait d'Elizabeth à Harlon, tout paraissait clair.
Puisque d'Elizabeth à Harlon, il avait le regard qu'Harlon aurait tour à tour eu pour Elizabeth et Luke Skywalker.
« Tiens ! » Il avait empoigné une des valises, alors qu'I-sys traînait le reste. L'Empereur joua les portiers, et laissa sa future femme entrer. La cabine avait un luxe comparable à celle de l'Empereur. « C'est ta cabine privée. En plus de la mienne bien entendu. » Une envie de se réfugier ? De se reposer alors que la première était occupée à autre chose ? C'était là son antre privée. Harlon s'en refusait le droit d'accès. « Tu prends le petit-déjeûner avec moi ? » Qu'il fasse traîner la matinée. Sinon il allait se morfondre, se ronger les ongles et les sangs, avant de partir se rouler en boule, et partir complètement fou pour la cérémonie. « Il y a du... chocolat chaud. » Mais surtout, rien de sexuel !
Des tablettes de chocolat fondues dans du lait de Bantha frais. Du noir dans du bleu, pour une saveur toute particulière. Des viennoiseries, sans chocolat, et quelques nouvelles sur un holojournal de luxe. Harlon le lisait distraitement, quand Elizabeth n'était pas là, soit pour aller à ses valises, soit pour aller... ailleurs. « Ta Garde est toujours en accord pour encercler l'autel je crois ? » Qu'on règle maintenant les changements s'il y en avait. « J'aurai besoin d'une grosse heure pour me préparer. » Entre deux informations, il se prenait à discuter trivialement, pour peu qu'Elizabeth s'en sente l'envie. Il n'allait pas lui briser ses routines non plus. « Avant qu'on aille se préparer, tu veux rester ici ? » Un air un peu suppliant, caché avec habileté, pour formuler la demande. « Te reposer encore un peu, te détendre en musique ? » En toute abstinence.
Les deux heures et quelques de préparation commenceraient dans quelques minutes. Il la laissait aller dans sa cabine. Avant que lui-même ne commence à se préparer, il s'accorda un temps de réflexion. Et de décision. D'aller au devant d'Oberan. « Capitaine Oberan ? » Il tendit la main. « Ravi de vous revoir. » Mains dans le dos, pourpoing serré au torse, bottes déjà enfilées. Avat le petit déjeuner, une douche revigorante, à la mode impériale, et maintenant, une épreuve de testostérone. « Donnerez-vous le bras de votre Monarque ? » Il allait bien mettre les choses à plat, une bonne fois.
« Non... mettez ça ici. Là, tendez ça mieux. » L'AMiral n'était pas ravi de faire ce qu'il faisait. Il aurait été encore moins ravi de ne pas le faire cela dit. Décorer son pont... L'Executor, lieu de mariage avec une Alien. Etaient-ils tous tombés si bas ? D'accord, l'Empereur avait interdit les relations interespèces les plus dégradantes... Certes, ils avaient enfin les moyens militaires réclamés à corps et à cris depuis des lustres. Soit, la stabilité régnait dans toutes les régions sous contrôle... Mettons, ils avaient des conditions de vie décentes. Mais de là à prendre l'Executor comme des commodités ?
Les fosses du pont étaient comblées, avec des étaix en duranium sous des plaques décoratives asticieuses. On alliait un genre de fantaisie de mosaïques avec le noir lustré traditionnel. Les murs étaient rafraîchis de tentures pastels, les plafonds égayé de banderoles entrelacées avec soin, les tresses alternativement de goûts impériaux nouanais et arkaniens, plus exotiques mais tout aussi légères dans la présentation. Son pont n'allait pas se transformer en fête de village de pêcheurs de Nez Peron... Ils allaient garder l'allure impériale en toute circonstance. Même s'il se devait d'accéder aux requêtes de l'Empereur, sur le déploiement de signes festifs, à même d'encourager les troupes.
D'autant qu'il était surveillé par-dessus son épaule par Gilad Pelleaon, qui prenait l'affaire très au sérieux. Sa moustache sévère et son uniforme qui ne l'était pas moins terminaient un tableau de rigueur et de parfaite exécution. « Sur Bastion, les funérailles de l'Empereur sont répétées chaque semaine avec le cortège des Ailerons Sanguinaires, Amiral. Des frais, de l'inutilité ? L'Empire est un cérémonial. Et célébrer la réconciliation et l'amour entre les citoyens de l'Empire devrait être une priorité. Alors comptez-bien sur la réussite de ce mariage, et sur le transport des époux comme des invités... » Le ton était lourd. L'ambiance plus légère. Les volontaires parmi les équipiers de bord voulaient tous participer, et surtout terminer à la fin de la double haie d'honneur qui partait des cabines pour aller jusqu'au pont. Assister au mariage de ses yeux, c'était une ligne garantie sur ses états de service. La question "Alors, comment c'était ?" de la part d'officiers envieux, qui pouvaient aussi bien vous refuser pour cette envie que vous arrachez à un salaire augmenté. La fête annoncée était un lieu de tous les fantasmes.
Les cantines allaient servir un repas digne du mess pour l'occasion. Des provisions spéciales faites en complément de l'habituelle cargaison de victuailles. Fini les rumeaux et la nutripâte, place à la viande en sauce, aux légumes frais, aux petits pains chauds, aux corbeilles de fruits. On déplaçait les banquets dans les hangars, que l'ambiance soit à la fête au nombre. Quelques soldats - jamais de StormTroopers - sélectionnés pour leurs talents d'artistes dans le civil allaient faire quelques animations hautes en couleur et en musique. Les hommes qui avaient fauté et ne méritaient pas de participer feraient l'équipage réduit auquel un vaisseau capital devait toujours prétendre. Les équipages des autres vaisseaux de l'escorte avaient rejoint l'Executor à bord de centaines d'aller et retour de navettes. A bord du vaisseau capital, on comptait alors pas loin de 450.000 individus, dont à peine 100 invités formels. Le BSI choisit avec soin ceux qui feraient la double haie d'honneur pour mener à l'autel, ainsi que ceux qui feraient celle menant les deux époux au banquet qui se tenait dans le Hangar Amiral, débarrassé de ses vaisseaux et de ses containers habituels.
Les époux décideraient plus tard s'ils feraient le tour des autres hangars pour saluer les "petites gens" qui y seraient.
Mais d'abord, le Bureau s'assurait que chaque arme de service soit mise aux casiers règlementaires. Pas d'arme sur l'endroit, sur toute la durée de l'évènement.
On ne voulait prendre aucun risque... pour personne.
L'escadrille disparue fut traitée dans le plus grand silence par l'Amiral en second, qui envoya quelques autres vaisseaux en patrouille autour de la zone de la Nébuleuse. Les circonstances de leur perte étaient si... nébuleuses... qu'ils craignaient le pire. En espérant que les époux ne demandent pas à se rendre en son milieu, pour l'exotisme du paysage.